Des Pavés à la plage Mai 68 vu par une jeune fille de la Sorbonne
Extrait des derniers chapitres

Sous les pavés, la grève
Ce monde est devenu trop violent. Tout va trop loin. Cinquante ans après Mai 68, je réalise à quel point nous étions des gentillets, des utopistes, des rêveurs, des anarchistes non violents.
La situation est bien différente aujourd’hui. Police partout, Justice nulle part. Aussi est venu le temps de la grève générale.
Comme le dit Gaël Quirante, syndicaliste CGT de la Poste dans un article de Reporterre le 10 mai 2018 :
« Pourquoi a-t-on gagné en 1995 ? Parce qu’il y a eu une grève reconductible chez les cheminots, qui reprenait tous les jours et imposait un rapport de force au gouvernement de l’époque. Pourquoi a-t-on gagné en 1936 ? Parce qu’il y avait une grève reconductible et des occupations d’usine. Pourquoi a-t-on gagné en 1968 ? Parce que sous les pavés, il y avait, avant tout, la grève. »
J’arrive à la fin de ce livre alors que le mois de mai s’achève. Le Grand Soir n’est pas encore là. Les jours heureux de la reconstruction de la France sous le Conseil National de la Résistance ne sont pas revenus.
Mais ce qui s’est passé entre les cheminots, les étudiants, les soignants, les retraités, les zadistes etc, personne ne peut nous le reprendre. Les luttes continuent partout, invisibles souvent, mais réelles et bien vivantes. Je sais qu’elles finiront par gagner sur les privilèges des élites.
Sous les pavés, la grève !
« — Où allez-vous, jeunes gens, où allez-vous, étudiants, qui battez les rues, manifestant, jetant au milieu de nos discordes la bravoure et l’espoir de vos vingt ans ?
— Nous allons à l’humanité, à la vérité, à la justice ! »
Émile Zola in Lettre à la jeunesse, La vérité en marche, Charpentier, Paris, 1901
Au printemps 2018, je finissais mon livre sur Mai 68 par cette page de conseils. Le temps est arrivé. Une grève générale est lancée pour le 5 février 2018 par les Gilets jaunes.
Quelques conseils pratiques pour affronter une grève longue et paralysante
- Prenons nos précautions. Préparons des provisions.
- Prévoyons des groupes électrogènes, des bouteilles de gaz, des feux de bois.
- Prévoyons des bougies, des lampes LED.
- En cas de coupure d’électricité, les plats congelés risquant de se perdre, faisons des conserves et préparons des plats lactofermentés.
- Stockons des packs lyophilisés de survie.
- Stockons des éléments de première nécessité.
- Stockons de l’eau. Repérons les points d’eau.
- On trouve de l’eau dans les cimetières, sauf en cas de coupure généralisée pour pollution grave ou autre événement exceptionnel.
- Cultivons nos jardins dans nos potagers, sur nos terrasses, nos balcons, devant les baies vitrées. Apprenons les plantes sauvages qui peuvent nous nourrir en cas de pénurie de vivres.
- Utilisons les outils à notre portée.
- Privilégions les chargeurs solaires pour nos tablettes.
- Stockons de l’essence ou ressortons nos vélos.
- Changeons notre façon de consommer.
- Allégeons les courses. Allons au plus près.
- Réinventons la vie. Notre survie est à ce prix.
Vive la grève générale du 5 février 2019
Préparons-nous dans nos têtes à nous priver d’énergie. Autrefois, en 67, par exemple, nous étions habitués aux grèves générales d’une journée, l’électricité était coupée, il n’y avait ni métro ni bus pour se déplacer dans Paris, ni train pour aller et venir en banlieue parisienne. En 68, tout s’est arrêté et c’était pas triste, comme disait Gébé, de Charlie Hebdo : « On arrête tout et c’est pas triste ! »
Nous sommes devenus habitués à plus de confort qu’il y a cinquante ans. Chaque période longue de coupure de courant nous ramène à l’âge des cavernes, à la préhistoire, ou à l’Ancien Régime. Il va falloir être solidaires. Les épisodes de catastrophe naturelle nous redonnent le sens des priorités. Je me souviens de l’ouragan qui avait laminé la Bretagne la nuit du 15 octobre 1987. Nous étions restés un mois sans électricité ni téléphone. Certains avaient le réflexe du « Chacun pour soi » et « Moi d’abord, les autres après », comme me le racontait tristement un ami couvreur. On a vu aussi se lever de nombreuses solidarités où chacun se donnait la main. Ici, chez moi, à Kerantorec, nous avons reçu pas mal de monde, qui ne pouvait pas faire à manger. Moi j’ai toujours du bois pour faire un feu. Et nous avons fait preuve d’imagination pour accommoder ce qu’il fallait consommer en urgence des congélos. Il m’en reste de bons souvenirs de grandes tablées et des tableaux qui émergeaient chaque jour sous nos yeux de l’imagination colorée d’Yves Samson.
Alors, vive la grève générale ! Enfin, la CGT a choisi une date, le 5 février. Les Gilets jaunes ont lancé le mot d’ordre d’une grève générale illimitée à partir de cette date.
Voici l’appel solennel de François Boulo, avocat, Gilet jaune via Le Media :https://www.facebook.com/1130359796/posts/10217363113286385/
Cette liste de survie n’est qu’un début, on continue le combat ! Si vous avez des idées pour la compléter, partagez dans les commentaires. Merci !
En l’An 2019, on remet tout à neuf !
Gaelle Kermen,
Kerantorec, le 26 janvier 2019
