En 1970, j’habitais 10 boulevard Poissonnière, l’immeuble à côté de celui de L’humanité, avant son déménagement rue du Colonel Fabien.
En bas de l’immeuble de l’Huma, se situait la Librairie Nouvelle où ma boulimie intellectuelle trouvait tous les livres de mes années d’étudiante à la fac de Vincennes en Droit-Science Po, Socio et Philo.
De notre balcon du 6eme étage en face du cinéma Rex, nous assistions à des événements comme les manifestations importantes, les soirées d’élection, l’enterrement d’Elsa Triolet ou l’arrestation de Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir vendant le journal interdit La Cause de Peuple.
Je suis retournée sur les lieux le 17 août 2012 comme je séjournais à Paris pour faire les premières corrections du Journal de l’année 70, devenu Clandestine 70, publié en 2020.
La terrasse de l’appartement de ma sœur qui m’hébergeait alors, au sixième étage, était transformée en jardin. Il me plait de savoir que nous sommes remplacées par des passionnés de plantes, d’arbustes, de fleurs. Je crois que je l’avais rêvé ce jardin en terrasse parisienne…
En haut, au sixième de l’immeuble du centre, nous habitions ma sœur et moi de fin 1969 à fin 1972.
Retour sur les lieux le 17 août 2012, comme je faisais les premières corrections du manuscrit Clandestine 70 issu des Cahiers parisiens.
A notre époque, ce magasin était la Librairie Nouvelle, au rez-de-chaussée de L’humanité. C’était un lieu vibrant de culture, de connaissances, où je m’approvisionnais dès que j’avais quelques sous. Les temps changent…
L’entrée du 10 boulevard Poissonnière, Paris, 9e
En face de notre balcon, le cinéma REX
Notre station de métro était Bonne Nouvelle.
Extrait de Clandestine 70
***
3 juin 1970
le creux de la nuit est le seul moment où le bruit du boulevard s’estompe un peu
cinq heures du matin
en bas le trafic reprend
mon bureau est couvert de feuilles et de bouquins
il fait somptueusement beau
un soleil de passion se reflète dans les vitres du cinéma rex en face
je viens de bouffer du pâté et du saucisson
je pourrais continuer à travailler tant je me sens bien
il y a longtemps que je n’avais vu le soleil se lever
il y a deux ans en 68 avec brice j’appréciais les charmes d’un soleil en ciselure sur la chapelle de la sorbonne dans la cour d’honneur
il y a trois ans en 67 avec hélène nous avions passé quelques nuits sans dormir à errer dans les rues de paris en découvrant au petit matin le ciel immense du côté de notre-dame
à l’époque il y avait les halles et c’était le bon temps
mais aujourd’hui c’est pas mal non plus
et je suis bêtement heureuse
l’impression de ne pas être seule dans la nuit
d’être proche de platon qui écrit
peut-être même de mikis
tout est possible ce matin
l’époque est revenue où je peux de nouveau travailler
dynamisée par le soleil
soutenue par un afflux de forces vives
en fait je ne fais rien pendant l’hiver
j’hiberne
mes vraies périodes de travail ont toujours commencé au mois de mai
j’ai toujours préparé les examens vingt-et-un jours avant leur date
quand tout dans ma tête devient clair comme le temps
quand tout dans mon corps est en accord avec moi-même
S’affranchir des fuites du temps pour créer un nouvel espace de gestion des projets avec Aeon Timeline, écrire un roman, prévoir et suivre des chantiers.
S’affranchir des contraintes de l’ordinateur de bureau pour écrire un livre en liberté sur Scrivener iOS.
« Parce que c’est si sympa de pouvoir utiliser son iPad ou son iPhone dans des moments où on n’est pas spécialement attablé pour écrire. L’inspiration a beaucoup de fraîcheur dans ces moments-là. Tout paraît facile. »
Catherine Hervais, thérapeute
Imaginez la scène
« Je m’imagine sans peine la scène. Un iPad mini transite du jardin au bureau, véritable caverne d’Ali Baba ou galerie d’art. Un iPad mini roule à vélo, puis s’arrête sur le bord des routes de campagne pour prendre une note au vol. Un iPad mini sur les plages les plus mystérieuses de Bretagne se met à briller de mots choisis, précis et porteurs de sens. Affichés sur l’écran tour à tour, Scrivener ou Aeon Timeline sont en pleine synergie d’écriture. L’essentiel, l’émotion, l’authentique. Faire jaillir l’étincelle de créativité dans le regard de ceux qui jusque là fermaient les yeux en se disant : ce n’est pas pour moi. Ouvrir tout grand un nouvel univers de possibilités. La valeur est bien là et je crois que cela va changer bien des perceptions sur l’écriture. »
Xavier Théoleyre (Créateur de Writing Spark)
C’est ma vie d’écriture que Xavier Théoleyre décrit ici. Imaginez la vôtre…
Avoir un seul iPad comme ordinateur personnel ?
Nous sommes de plus en plus nombreux à écrire nos livres et articles uniquement sur l’iPad depuis la sortie de l’application Scrivener iOS le 17 juillet 2016.
Est-il possible d’écrire un livre entier sur l’application, sans avoir besoin de passer par le logiciel de bureau, Scrivener 3 pour Mac, bientôt pour Windows ?
La tablette nomade remplacerait-elle l’ordinateur de bureau ?
L’iPad suffirait-il à l’écriture d’un livre ou pour des travaux d’écriture comme la production d’articles, scénarios ou mémoires?
Quels en sont les avantages, quelles en sont les limites ?
C’est ce que je vais explorer dans ce guide destiné à la maîtrise de l’application Scrivener iOS sur iPad et iPhone.
J’ai désormais une bonne expérience d’écriture et de publication. Je travaille dans d’excellentes conditions, j’ai acquis une bonne organisation et une bonne connaissance de la technique. Je vous transmets les manipulations principales que j’utilise moi-même pour faire mes livres. Appropriez-vous les fonctions de Scrivener iOS, adaptez-les à vos besoins pour vous concentrer sur l’essentiel : l’écriture et la publication.
Pourquoi ce guide
Lorsque j’ai écrit mon guide Scrivener plus simple pour iPad et iPhone, l’application était en anglais. Les captures d’écran étaient en anglais. Ce n’est plus le cas depuis la sortie de Scrivener 3 pour Mac, l’application a été francisée et mise à jour le 17 novembre 2017.
J’avais dans l’idée d’écrire une nouvelle version du guide Scrivener iOS en l’illustrant par des écrans en français. Au vu de ma belle expérience en la matière, j’ai eu envie d’aller plus loin que ce premier guide et d’écrire un livre qui permettrait aux auteurs d’utiliser leur iPad et leur iPhone autrement que pour y prendre des notes ou suivre les réseaux sociaux.
Le défi que je me lançais était de construire le guide comme je le fais d’habitude en réfléchissant sur une carte mentale SimpleMind sur iPad, puis de le construire, l’écrire, le corriger, le réécrire, le formater, le compiler entièrement sur l’application, en vérifiant si je pouvais aussi publier les différentes versions sur mes plateformes numériques habituelles, Amazon et Smashwords.
Je me donnais deux mois d’écriture, de corrections, formatages, compilation et publication. Un test in situ. Un nouveau projet plus stimulant que celui de reprendre l’ancienne version et d’actualiser les captures d’écran, ce que je n’avais pas réussi à faire.
Ce serait donc : Écrire un livre entier sur iPad avec Scrivener, dans la série Guide Kermen Pratique, catégorie Scrivener plus simple.
Je suivais mes publications dans un projet AeonTimeline sur mon iPad ou iPhone. Ce qui est estompé est déjà fait. Ce qui est en noir est encore à faire.
Le livre a été écrit pendant le mois de janvier 2019, en trois semaines, temps idéal d’un premier jet.
Au mois de février, je l’ai laissé reposer pour écrire le guide Aeon Timeline plus simplepourles francophones, ce qui m’a semblé alors prioritaire, eu égard aux questions que me posaient des camarades scrivonautes.
La situation était la même que lorsque j’avais conçu le premier guide Scrivener plussimple : il n’existait aucune documentation francophone sur cet outil complémentaire de Scrivener pour tracer les frises chronologiques des intriques de romans, le déroulement d’un scénario ou des projets de management.
Pendant le Camp NaNoWriMo du printemps 2019, j’ai repris les deux premiers jets de l’hiver. Le mois d’avril a été consacré à la relecture, la révision, la réécriture, les corrections et les mises en forme des deux guides écrits en hiver.
Pendant le Camp NaNoWriMo de l’été 2019, Aeon Timeline plus simple pour les francophones a été entièrement revu, restructuré, complété, illustré, corrigé, puis relu par d’autres yeux que les miens en bêta lecture.
Il est publié en ebook mobi Kindle chez Amazon et en ebook ePub chez Smashwords, qui le diffuse chez Apple et Kobo, etc.
Forte de la belle énergie de la bêta-lecture et de la publication d’Aeon Timeline, j’ai repris le premier guide de l’année Écrire un livre entier sur iPad avec Scrivener. Je l’ai fini au mois d’août et l’ai publié depuis l’iPad mini 4, y compris pour le test de la publication de la version brochée sur Amazon Print KDP.
Dans ces nouveaux guides pratiques indispensables pour bien maîtriser Aeon Timeline et Scrivener, je vous confie les procédures efficaces de travail sur supports fixes ou mobiles, en privilégiant les outils nomades qui changent vraiment notre vie.
Je vous encourage et vous soutiens dans votre élan créatif à toutes les étapes de l’écriture, afin que vous maîtrisiez vos outils de travail dans le but final : publier votre ouvrage.
Écrire, c’est bien. Publier, c’est mieux. Au travail !
Bon vent ! On largue les amarres ! C’est parti.
« En précommande à moins de 5 €… le guide complet pour écrire et réaliser un livre entier avec un seul iPad et l’application Scrivener. Un guide différent, pratique. À lire comme une histoire, avec plein d’informations annexes et passionnantes. Une écriture vivante et inspirante. Bravo à Gaelle Kermen ! C’est grâce à un de ses guides précédents que j’ai pu en quelques heures commencer à utiliser la très géniale application Scrivener. Avis aux écrivains, mais pas que… »
Sophie Sallé
(Les notes entre parenthèses sont de février 2019, en particulier pour préciser les noms de quelques personnes dont je ne donnais que les prénoms. Certaines sont devenues célèbres.)
Transferts de dossier entre la Sorbonne, la fac de Nantes et le Centre Universitaire Expérimental de Vincennes
Justificatif de diplôme de la Sorbonne lors du transfert des dossiers entre Universités CELG (Certificat Etudes Littéraires Général : Philosophie, Latin, Anglais)
samedi 1 février
9h30 droit constitutionnel
je n’arrive évidemment pas à me lever pour aller à vincennes où j’ai rendez-vous avec michel mon petit camarade
tant pis
d’ailleurs il y a ce foutu déménagement à faire
gilbert ne vient pas
je suis furieuse
d’accord ça ne l’amusait pas de venir nous aider mais moi non plus ça ne m’amusait pas de le présenter à kiki vu que kiki ne pouvait plus entendre parler de pierre et qu’elle met tous les frères dans le même sac
elle n’a sûrement pas tort
donc je les considère comme n’existant plus
maya (Evic) vient en voisine nous aider avec deux amis
philibert aussi
sympa
dimanche 2 février 1969
j’ai bien dormi
il s’agit ici de prendre possession de l’espace
ce dont nous n’avons pas l’habitude
je fais la cuisine
bien
sur ce minuscule camping-gaz
l’après-midi yvon (Yves Petit de Voize) vient
il joue à m’interviewer sur la mini-cassette en tant que contestataire de vincennes
puis arrivent maman grand-mère le cousin et sa femme qui persiste à m’appeler cousine ce qui m’agace fort
tout le monde me fatigue
j’ai horriblement mal au dos et je dors très mal
michel de vincennes m’a curieusement manqué tout le week-end
tout jeune sans doute
l’an dernier il était encore lycéen il faisait partie des c a l comités d’actions lycéens en mai dernier
tout enthousiaste
j’aime ça
les gens qui vivent et ne sont pas encore usés ni désabusés
intacts
lundi 3 février
je n’ai pas du tout envie de me lever pour aller au cours à neuf heures
j’ai le corps tout endolori
et puis comme je suis réveillée j’y vais
en allant vers le bus j’entends un sifflement appel
c’est michel on se retrouve toujours
cours de libertés publiques avec casamayor
un drôle de bonhomme très sympathique qui nous parle de langage et de cohn-bendit et de contestation et de camarades
qui nous donne un devoir en nous disant
dites-moi ce que vous pensez vous
n’allez pas chercher dans les livres
c’est la première fois de ma vie qu’on me demande de penser pour un devoir
au déjeuner je ne retrouve pas michel
je suis furieuse contre moi-même de l’attendre et de le chercher plus ou moins consciemment
je me résous finalement à aller à la bibliothèque lire le bouquin d’aron sur la société industrielle
je me réfère aussi à chevallier
et me passionne pour montesquieu
mon dieu commencerai-je enfin à comprendre les choses
mais j’ai mal aux dents
mardi 4 février 1969
courses pour ma sœur et l’appartement
je ne vais pas à la fac aujourd’hui
tant pis je ne verrai pas michel
mais il faut que j’aille voir l’oculiste j’y perds beaucoup de temps
puis je passe chez aurélia lui apporter l’ensemble en tricot fait par maman
elle prévoit que demain les flics seront sur les campus et autres conneries dramatiques de son genre elle est folle je pars vite
je rencontre une amie de la fac de droit d’il y a deux ans une jolie petite vietnamienne elle a revu récemment jacques mon meilleur copain d’alors j’aimerais le revoir
hélène n’est pas chez elle
j’achète chez maspero raymond aron et le themis de touchard je fais mon dernier chèque
je dois lire aron pour demain
la situation universitaire s’aggrave
ou peut-être est-elle excellente comme dirait le camarade mao
mercredi 5 février
cours avec rouvier
il parle à la fin du risque de fermeture de vincennes
je lui ai posé la question au cas où une grève serait décidée
la fermeture dit-il se fera département par département
d’abord ceux qui n’ont pas encore commencé comme la socio et la philo
dans l’escalier du restau u je retrouve michel il y a longtemps qu’on ne s’est vus oui on commençait à s’ennuyer nous déjeunons ensemble
hier des c d r comités de défense de la république ont menacé de venir
ça a été un ridicule branle-bas de combat
après le repas je me fais draguée par un jeune con qui doit être réac et je perds michel
cours de théorie marxiste un joli minet me sourit de ses yeux bleus
le chargé de cours lui-même engage le débat
le minet continue sur la grève
je donne l’information de rouvier
je retrouve le minet à l’ag il est anar c’est trop joli ça
il est tout doux
un doux anar c’est rare
grève votée hélas nous restons dans les cours à discuter
mon minet anar est très caressant je flirte avec lui en rentrant mais je rentre
jeudi 6 février 1969
je n’ai plus envie de flirter entre deux métros
je n’ai pas envie de revoir mon petit anar d’hier
d’ailleurs il vivait chez papa-maman
dentiste puis visite à hélène au lieu d’aller en socio où il sera
nous prenons le thé
maïté se ramène elle m’apprend que pierre est parti
de toutes façons il y a longtemps que je le considère comme parti
je l’avais même oublié
vincennes sciences po
michel n’est pas là mais philippe (Philippe Houzé) compte sur moi pour expliquer la situation
c’est dur dans ce groupe qui dit on veut travailler
a g un monde fou
je vois glücksman mais pas michel
je reviens au cours
ambiance idiote
philippe est sympa
michel arrive enfin il est furieux de voir un cours en amphi
plus tard nous discutons avec le prof et trois types réacs dont mon dragueur
j’ai envie de pleurer
michel aimerait peut-être me consoler
nous sommes déçus
vendredi 7 février 1969
que faire pour lutter mon dieu je ne sais plus
la grève active ne servira à rien
alors la défendre parce que je suis en minorité et engagée dans une idéologie
j’ai envie de pleurer
cinq heures trente a g
michel vient d’arriver nous nous trouvons tout de suite
il dit qu’on ne s’est pas tellement vus
que plusieurs fois il m’a cherchée vainement
c’est gentil ça
j’appelle gérard chez rychter
il prétend que les modèles ne marchent pas
il ne sait pas quoi faire
il a pas l’air d’aller bien je dois le voir lundi
a g glücksman parle bien un autre aussi
je suis avec michel et deux copains dont un de droit très sympa
je vais au cours de droit constitutionnel
discussion avec des types de l’a g e v
ils sont durs à convaincre ces réacs
je vais chercher michel et l’autre mais l’a g est finie je les ai perdus
je rencontre yannis
je retourne au cours
discussion toujours presque risible
pourquoi ça vous gène les flics dans la fac
évidemment on se demande
samedi 8 février
en quittant vincennes hier soir j’ai retrouvé michel dans le métro avec ali l’iranien connu au buci ami de brendan c’est marrant (une scène d’Aquamarine 67)
mais je suis rentrée pour travailler
matin de neige je tousse
hélène élise
soir à la radio j’entends annoncer que cent quatre-vingt-trois étudiants ont été choisis par le doyen sur les deux cent vingt qui ont occupé la fac le vingt-trois janvier ils risquent la même sanction que ceux du rectorat de la sorbonne
recevrai-je une lettre
je me demande si je ne suis pas enceinte
je le serais de pierre et ce n’est plus le moment
je n’ai pas le droit d’attendre un petit bébé encore et c’est mon drame
j’ai tellement envie d’aimer
dimanche 9 février 1969
dimanche ensoleillé
errances dans quelques bouquins dont marcuse qui avec le pouvoir de sa pensée négative me dynamise
visites
philibert
hélène et yannis
discussions
c’est bien je m’affirme
j’ai le pouvoir de l’humour
ce qui m’effraie le plus dans le mouvement c’est qu’on perd cet humour qui était notre plus grande force
quand je vois ces discussions agressives et hargneuses je suis triste
c’est tellement bête
fini à trois heures du matin mon devoir sur le langage pour le cours de libertés publiques de casamayor qui nous a demandé ce que nous en pensions
c’est la première fois en autant d’années d’études qu’un prof me demande mon avis
je suis assez contente de moi
maintenant je sais m’engager
j’écris pas trop mal
j’ai une faim énorme de travail et d’amour
lundi 10 février 1969
libertés publiques devoir sur le langage
cours de casamayor qui m’autorise à partir vers dix heures trente pour me rendre à l’a g concernant ceux qui ont été emmenés à beaujon
projets de lettre en réponse au recteur
à la fin de l’a g je retrouve emmanuel du c r a c sorbonne pas vu depuis longtemps
michel a reçu sa lettre samedi matin il est avec une nana de son groupe d’éco po et je le perds de vue rapidement
je déjeune avec emmanuel puis nous allons à la bibliothèque
je tombe sur un bouquin de libertés publiques
l’oppression et la répression me révoltent
il faut arrêter ça
faire quelque chose
une grève de la faim
j’y crois
tout semble perdu
perdu pour perdu autant aller jusqu’au bout
à l’a g je me retrouve assise à côté de corinne connue cet été à kerfany
elle aussi était à beaujon
je retrouve michel il semble assez abattu
je propose mon projet de grève de la faim
on me le déconseille
films sur mai
je suis toujours révoltée
je rentre
je n’ai pas encore reçu ma lettre
mardi 11 février 1969
dix heures les types du téléphone me réveillent (pour la pose de la ligne)
je me sens horriblement mal
nausées vertiges
serais-je vraiment enceinte
hier j’ai repris normalement mon contraceptif
ça se bat peut-être là-dedans
si nous avons fait un bébé c’était au moment où nous avons vu rosemary’s baby
vraiment non merci
je n’en veux pas
onze heures moins le quart le facteur m’apporte ma lettre recommandée
vincennes sous la neige
michel tout de suite
je vais signer la lettre collective
on va au quartier sous la neige
au ramsès j’ai le temps de serrer la main de jacques bleiptreu d’embrasser françois donzel toujours aussi barbu
sorbonne déprimante
on rentre par maspéro
marcuse
soir on a le téléphone
on appelle nantes
gene a accouché hier
sa petite fille n’a pas vécu
je suis trop démoralisée
mercredi 12 février 1969
lire bouquin aron
socio économie
matin réveil normal je n’ai pas de bêtes nausées
j’essaie d’appeler la clinique de nantes c’est pas libre
cours de rouvier
je ris tout le temps sauf au cours de rouvier
malgré ses grands efforts rouvier est la seule personne qui ne me fasse pas rire
je bouffe avec un petit minet de socio mignon marrant intelligent avec des problèmes adolescents encore
théorie marxiste le prof veut créer un groupe de militants
je suis d’accord on doit se retrouver avec l’a g et le cours de nicos poulantzas
a g avec rémy kolpa-kopoul du comité d’action tout doux tout jeune
la plupart des étudiants sont tout doux et tout jeunes j’aime
de plus en plus de types de droit viennent me voir en dehors des cours pour discuter
poulantzas et son cours sur le fascisme
rémy m’y a suivie et nous restons ensemble ensuite pour discuter avec le prof de théorie marxiste
on veut faire des tracts le type tape le texte on cherche du papier on n’en trouve pas mais on rencontre beaucoup d’appariteurs musclés
je rentre avec le prof
jeudi 13 février 1969
exposé sur tocqueville
nuit agitée
au matin rêves de pierre
réminiscences de ses caresses de ses meilleurs baisers
eau port pont bateau
devoir à faire mais je préfère l’amour
appelé gene
elle semble toujours très forte mais flanche en me parlant
c’est atroce on a l’impression qu’un amour immense et inconditionnel peut être totalement stérile et vain
on ne peut empêcher l’impossible
j’arrive vers quatre heures à la fac à la sortie d’une a g
j’apprends que s’est créé un groupe d’intervention droit qui a décidé d’aller à la gare de l’est ce que je crois inutile
ça les déçoit beaucoup car ils le disent eux-mêmes ils viennent de se réveiller
je reste tirer des tracts
je retrouve michel dans une a g spontanée après la manif
nous traînons tard dans la fac et rentrons ensemble
vendredi 14 février
le jeune michel est de plus en plus caustique
il me rappelle l’esprit de guy s de saint-leu
j’ai enfin des lunettes
d’ailleurs on ne voit plus qu’elle je disparais derrière
ça me plaît
vincennes vers deux heures
film sur les black panthers et débat très intéressant avec julia herve du s n c c student nonviolent coordinating committee
je retrouve marianne
plus tard je retrouve aussi mais lui après trois ans daniel domingo et ça me fait très plaisir c’est lui qui a ouvert mes yeux sur l’art les peintures les sculptures les galeries les musées
il fait très froid à vincennes
je n’ai pas vu michel
il déserte
il faudrait que je travaille
mais je sais que tout ce temps qu’on perd à discuter on le gagne
samedi 15 février
marché de la porte saint-martin
je distribue des tracts pendant que ma sœur fait les courses
froid terrible qui me gèle les doigts les pieds la bouche
je crains que le militantisme ne soit pas fait pour moi ni moi pour lui
douce après-midi
ma sœur tape des articles pour gault et millau
je revois mon programme de droit constitutionnel
ces trois dernières années d’errance n’auront pas été vaines
je comprends un peu mieux maintenant
soir train saint-leu
fridu et cendrine mes animaux
dimanche 16 février 1969
rêves terribles de feu et de mort
je suis brûlée vive et enterrée mais pas tout à fait morte
et de nouveau le feu
puis plus tard rêve de pierre bien sûr
je lui en voulais horriblement
mais de quoi au fond
symboles oniriques de rosemary’s baby
le bébé de gene
le mien
j’en aurais tellement voulu à pierre s’il m’avait fait un bébé
parce que ça aurait été ma faute et parce qu’il n’est plus là
de toute façon consciemment ou non je lui en veux
et ça me rend folle
à part ça neige
je m’engueule toujours avec maman qui m’énerve
je réétudie mon livre d’histoire de seconde et ça me passionne
lundi 17 février
neige sur vincennes
c’est très beau
fourquet à cestas a tiré sur ses deux gosses et puis sur lui quand ces salauds de flics ont donné l’assaut
aberration de la soi-disant justice bafouée paraît-il et la police ridiculisée par elle-même
philippe au cours de libertés publiques
philippe au restau u
michel trente secondes
philippe au cours de droit constitu
philippe à la bibliothèque
jusqu’à ce que je quitte la fac
décidément je suis au mieux avec les biscuits geslot et voreux
marianne au téléphone
puis j’appelle michel
on parle longtemps ça m’étonne en général les types n’aiment pas rester au téléphone
j’ai envie de travailler plus
mardi 18 février 1969
j’aurais aimé que hélène me coupe les cheveux mais quand j’arrive rue guisarde elle est dans son lit et pleure
peu à peu elle m’explique que yannis et elle vont se séparer
il est là aussi mais descend acheter des cigarettes
elle m’expose la situation
elle est à bout de nerfs
alors je me souviens trop de ma propre situation il y a un an maintenant et de l’attitude qu’a eue kiki avec moi quand elle m’a secouée pour me réveiller
j’aimerais que hélène se lève et vienne avec moi
il faut qu’elle parte même une seule nuit
mais je ne peux pas la forcer
ils se disputent
ils ont les mêmes réactions que pierre et moi
je me sens étonnamment forte mais ça me désole
c’est tellement vain
mais christian duc notre ami vietnamien adorable arrive
le courage de sourire et même de rire revient
quand je rentre je trouve kiki devant ma porte du boulevard poissonnière
elle passait là sans savoir que j’habitais là maintenant
elle s’invite avec yves et son copain d’auvergne serge déjà vu chez féraud
nous passons une excellente soirée
ma sœur a invité une collègue d’un certain âge olga qui revit et rajeunit au milieu de nous
mercredi 19 février
hier je me suis surprise à dire à brigitte de la boutique féraud qui m’appelait pour prendre rendez-vous pour la collection
mais je suis très heureuse de vivre
je n’aurais pas pu dire ça il y a un an
et kiki le sait qui a suivi mon évolution pour finalement me récupérer à l’hôpital
tout ce que je dois à kiki
tout
elle est heureuse de me voir enfin installée dans un appartement stable clair propre agréable et confortable
et puis seule enfin
sans des individus comme pierre ou ses frères qui me minaient
3h collection féraud rue du faubourg saint-honoré en face du palais de l’élysée
certains trucs que j’adore qui m’iraient très bien avec des contrastes de couleurs mais beaucoup de choses me semblent trop classiques pour féraud
je n’arrive pas à joindre gérard rychter
il faut absolument que je gagne de l’argent
europe soir
casamayor parle de cestas et de la justice
jeudi 20 février 1969
joli temps plein de soleil
hélène téléphone elle va bien
avec yannis ça va
ça ne me semble que partie remise
elle le sait mais ils ne peuvent pas se résoudre à une séparation
j’arrive à vincennes après quatre heures
à l’a g rémy tout chaud tout doux comme d’habitude
préparation de l’action de demain journée anti impérialiste
puis nous montons au cours sur marx et le marxisme
je connais une demi-douzaine de personnes déjà dont germinal l’anar ami de dany cohn-bendit connu il y a trois ans
après je vais au cours de sciences po avec une camarade journaliste un peu noire
michel arrive me voit ou ne me voit pas et se met de l’autre côté
je suis furieuse
mais je prends ma revanche quand philippe se dérange bruyamment et traverse tout l’amphi pour s’asseoir à côté de moi
ça n’a pas d’importance au fond
à l’entracte joël me rejoint aussi et michel vient dîner avec moi
nous restons ensemble très tard à la cafétéria
il est toujours très caustique
vendredi 21 février 1969
il fait beau merveilleusement beau et si doux
c’est un avant-goût du printemps
cours avec poulantzas
je me trouve en face de christian gaspard qui m’avait raccompagnée un soir au quartier il est un des membres valables du c a comité d’action avec glücksman salmon et quelques autres
puis bibliothèque où je retrouve certains types sympas de droit
michel arrive aussi
j’ai beaucoup de mal à travailler lénine
il fait beau
je suis très vibrante
le drapeau f n l front national de libération du sud vietnam flotte sur la fac dans un vent léger
brusquement je vois daniel l’ami de marianne traverser la bibliothèque et sortir
je le rattrape sans savoir pourquoi
il n’a pas vu marianne depuis longtemps
il me plaît soudain dans ce soleil avec le ciel bleu et rose comme ma robe
il dit que je ressemble à une petite japonaise
une amie passe et dit
oh tu es adorable comme ça
samedi 22 février 1969
je crois que je suis en train de tomber amoureuse
j’ai rêvé et rêvé de daniel
ça m’étonne
j’ai follement envie de lui
j’ai envie de vivre
j’écris très mal
j’entre sans doute dans une période qui ne me laisse pas de place pour écrire puisque je crève de vivre
dessiné aujourd’hui pas mal dans le soleil
vu ce soir sur les grands boulevards en bas de chez nous le film delphine de éric le hung avec dany carrel frédéric de pasquale et maurice ronet
juste agréable pas très profond et déprimant sur le milieu de la mode
quelques robes féraud qui m’iraient encore
un style des gestes une silhouette qui ressemblent à kiki ou à moi en plus ronde
une belle voiture des arbres du mouvement un homme
dimanche 23 février 1969
je voudrais
me marier
bientôt
entre les pommiers en fleurs
près des talus en primevères
à la petite chapelle de kermen
sur le chemin de la source
journée de ciel en nuances
piscine balade
mais trop de monde dans les rues
on rentre on goûte
et je m’endors comme un bébé
le soir je me mets au travail pour faire les devoirs sur les oppressions et la liberté demandés par casamayor pour demain
je me choisis un titre
répression garantie de la liberté
je travaille jusqu’à quatre heures et demie du matin
j’aime travailler la nuit ici quand le boulevard devient enfin calme
marcuse toujours lui
et il a soixante-dix ans
lundi 24 février 1969
mauvais réveil pas assez dormi et mal
je suis nerveuse et de mauvaise humeur ce qui m’arrive rarement
ma sœur est très gentille car elle pourrait m’envoyer balader
mais sa gentillesse m’agace encore plus
après son départ je fais de la gym pour me calmer
mais ça ne m’empêche pas d’avoir une gueule horrible
cours près de philippe
je reste nerveuse parce qu’il ne m’a pas proposé d’entrer dans son futur mouvement politique comme il l’a proposé à d’autres
me croit-il non valable
puis beaucoup de gens au repas entre philippe toujours et rémy et mon petit anar d’un soir et puis vite marianne
mais où est daniel
et puis brice (Brice Lalonde)
même brice qui dit
tu es toute rose
je réponds toujours
ah
et yannis
et michel devant qui je passe très vite
cours avec philippe on s’entend bien et c’est passionnant
plus tard je le retrouve à la bibliothèque il discute avec un voisin
moi je m’avale en deux heures à peine les luttes de classe en france de marx et engels
puis philippe me parle de ses problèmes pour le mouvement et je comprends qu’il m’impliquait a priori dans son truc
je suis flattée mais il me laisse toute liberté d’adhésion ou non à ce nouveau parti socialiste destiné à rajeunir le s f i o section française de l’internationale ouvrière
simplement il refusait de me recruter comme d’autres
puis longtemps il me parle de ses problèmes
ça m’ébranle ça m’inquiète un peu ça me flatte aussi
est-ce mon physique qui lui donne cette confiance en moi
mon physique de petit page comme il dit
je n’ai pas vu daniel le soir
peut-être n’était-ce qu’une illusion entre deux rayons de soleil et un fragment de ciel
mardi 25 février 1969
mardi long et lent
je perds beaucoup de temps à feuilleter des livres dans les libraires proches de la maison dont la librairie nouvelle en bas de l’humanité voisine
puis tardivement je me lance dans un bouquin d’histoire
je n’ai pas fait grand chose
zut
mercredi 26 février 1969
je me réveille trop tard pour aller au cours de rouvier mais je m’en fiche
son cours est hors sujet
je préfère rester étudier l’histoire du sort des paysans avant de foncer à vincennes où j’écoute pendant deux heures sans relâche le cours sur la lutte des classes et le 18 brumaire
enfin je suis l’histoire j’en comprends le sens tout s’éclaire
ensuite le cours de poulantzas sur la théorie marxiste du travail me paraît évident
il m’aura fallu deux ans de droit et un de sorbonne pour comprendre ça
puis au restau u marianne qui s’étonne de me trouver toujours aussi pimpante et daniel arrive
j’aime le regarder droit dans le visage au cœur des yeux
j’aime son autorité
j’aime moins la présence de marianne parce que je la gène malgré elle
jeudi 27 février 1969
margot ma cousine me réveille au téléphone elle est à paris c’est formidable
elle arrive vers midi et demie toujours en retard
je suis ravie de la revoir
elle m’accompagne chez le dentiste et en m’attendant va se balader du côté de la sorbonne
puis nous allons vers la rue d’assas attendre simon à l’i s e p institut supérieur d’électronique de paris
en chemin une douleur commence à envahir mes muscles du dos puis des épaules et enfin de la poitrine je respire avec peine et quand je m’assieds à l’école électronique c’est la crise d’asthme
la vieille secrétaire douce et dynamique m’offre du rhum et du thé
de l’alcool comme marcel proust quand il prend le train pour balbec avec sa grand-mère
simon est en cours
en attendant le bus je suis obligée d’entrer dans une boutique
la fille est aussi très attentionnée
je retournerai lui acheter des pulls
la douleur cette nuit persiste encore
j’ai affreusement envie de vivre
pas de mourir
vendredi 28 février 1969
j’ai mal toujours mal
chaque mouvement chaque souffle est une torture
je dois pourtant aller à maubert porter des trucs pour gault-et-millau
je grelotte je transpire
j’ai mal au dos
je rentre enfin
après un œuf à la coque et un yaourt je m’offre un whisky à l’aspirine et je m’endors
le soleil erre sur les murs
je voudrais
je veux
daniel
je me sens perdue
j’ai mal
rien n’a d’importance
dans vingt jours je l’aurais peut-être oublié
mais peut-être aussi
l’aurais-je
aimé
Écrit en février 1969,
Gaelle Kermen, Kerantorec, le 28 février 2019
Recto de la lettre recommandée du restorat arrivée en retard en raison du déménagement de l’île Saint Louis au 10 boulevard Poissionnière.
Un seul feuillet plié et agraffé pour être sûr qu’on avait reçu la lettre recommandée.
Des Pavés à la plage Mai 68 vu par une jeune fille de la Sorbonne
Extrait des derniers chapitres
Portrait par Jakez Morpain l’été 1968
Sous les pavés, la grève
Ce monde est devenu trop violent. Tout va trop loin. Cinquante ans après Mai 68, je réalise à quel point nous étions des gentillets, des utopistes, des rêveurs, des anarchistes non violents.
La situation est bien différente aujourd’hui. Police partout, Justice nulle part. Aussi est venu le temps de la grève générale.
Comme le dit Gaël Quirante, syndicaliste CGT de la Poste dans un article de Reporterre le 10 mai 2018 :
« Pourquoi a-t-on gagné en 1995 ? Parce qu’il y a eu une grève reconductible chez les cheminots, qui reprenait tous les jours et imposait un rapport de force au gouvernement de l’époque. Pourquoi a-t-on gagné en 1936 ? Parce qu’il y avait une grève reconductible et des occupations d’usine. Pourquoi a-t-on gagné en 1968 ? Parce que sous les pavés, il y avait, avant tout, la grève. »
J’arrive à la fin de ce livre alors que le mois de mai s’achève. Le Grand Soir n’est pas encore là. Les jours heureux de la reconstruction de la France sous le Conseil National de la Résistance ne sont pas revenus.
Mais ce qui s’est passé entre les cheminots, les étudiants, les soignants, les retraités, les zadistes etc, personne ne peut nous le reprendre. Les luttes continuent partout, invisibles souvent, mais réelles et bien vivantes. Je sais qu’elles finiront par gagner sur les privilèges des élites.
Sous les pavés, la grève !
« — Où allez-vous, jeunes gens, où allez-vous, étudiants, qui battez les rues, manifestant, jetant au milieu de nos discordes la bravoure et l’espoir de vos vingt ans ?
— Nous allons à l’humanité, à la vérité, à la justice ! »
Émile Zola in Lettre à la jeunesse, La vérité en marche, Charpentier, Paris, 1901
Au printemps 2018, je finissais mon livre sur Mai 68 par cette page de conseils. Le temps est arrivé. Une grève générale est lancée pour le 5 février 2018 par les Gilets jaunes.
Quelques conseils pratiques pour affronter une grève longue et paralysante
Prenons nos précautions. Préparons des provisions.
Prévoyons des groupes électrogènes, des bouteilles de gaz, des feux de bois.
Prévoyons des bougies, des lampes LED.
En cas de coupure d’électricité, les plats congelés risquant de se perdre, faisons des conserves et préparons des plats lactofermentés.
Stockons des packs lyophilisés de survie.
Stockons des éléments de première nécessité.
Stockons de l’eau. Repérons les points d’eau.
On trouve de l’eau dans les cimetières, sauf en cas de coupure généralisée pour pollution grave ou autre événement exceptionnel.
Cultivons nos jardins dans nos potagers, sur nos terrasses, nos balcons, devant les baies vitrées. Apprenons les plantes sauvages qui peuvent nous nourrir en cas de pénurie de vivres.
Utilisons les outils à notre portée.
Privilégions les chargeurs solaires pour nos tablettes.
Stockons de l’essence ou ressortons nos vélos.
Changeons notre façon de consommer.
Allégeons les courses. Allons au plus près.
Réinventons la vie. Notre survie est à ce prix.
Vive la grève générale du 5 février 2019
Préparons-nous dans nos têtes à nous priver d’énergie. Autrefois, en 67, par exemple, nous étions habitués aux grèves générales d’une journée, l’électricité était coupée, il n’y avait ni métro ni bus pour se déplacer dans Paris, ni train pour aller et venir en banlieue parisienne. En 68, tout s’est arrêté et c’était pas triste, comme disait Gébé, de Charlie Hebdo : « On arrête tout et c’est pas triste ! »
Nous sommes devenus habitués à plus de confort qu’il y a cinquante ans. Chaque période longue de coupure de courant nous ramène à l’âge des cavernes, à la préhistoire, ou à l’Ancien Régime. Il va falloir être solidaires. Les épisodes de catastrophe naturelle nous redonnent le sens des priorités. Je me souviens de l’ouragan qui avait laminé la Bretagne la nuit du 15 octobre 1987. Nous étions restés un mois sans électricité ni téléphone. Certains avaient le réflexe du « Chacun pour soi » et « Moi d’abord, les autres après », comme me le racontait tristement un ami couvreur. On a vu aussi se lever de nombreuses solidarités où chacun se donnait la main. Ici, chez moi, à Kerantorec, nous avons reçu pas mal de monde, qui ne pouvait pas faire à manger. Moi j’ai toujours du bois pour faire un feu. Et nous avons fait preuve d’imagination pour accommoder ce qu’il fallait consommer en urgence des congélos. Il m’en reste de bons souvenirs de grandes tablées et des tableaux qui émergeaient chaque jour sous nos yeux de l’imagination colorée d’Yves Samson.
Alors, vive la grève générale ! Enfin, la CGT a choisi une date, le 5 février. Les Gilets jaunes ont lancé le mot d’ordre d’une grève générale illimitée à partir de cette date.
Comprendre le passé. Apprécier le présent. Préparer le futur.
Lorsque j’ai écrit Des pavés à la plage, Mai 68 vu par une jeune fille de La Sorbonne, je voulais comprendre ce qui faisait que nous en parlions encore 50 ans plus tard. Dans mon bilan de 2018, j’espérais que le peuple se soulève. Le mouvement historique comme celui des Gilets jaunes va au-delà de mes rêves et j’apprécie le présent. Je publie ici les derniers chapitres du livre qui donnait des pistes de réflexion pour préparer le futur.
Chapitres extraits de la fin du livre écrit au printemps 2018 Des pavés à la plage Mai 68 vu par une jeune fille de la Sorbonne
Avant Mai 68 le mouvement hippie
Avant Mai 68, le mouvement hippie avait déjà changé les mœurs en apportant un début de liberté sexuelle. La pilule circulait déjà en 1967 et permettait à certaines d’entre nous de ne pas subir de grossesses non désirées. J’étais dans ce cas de figure comme mes amies, mais il faudra encore plusieurs années de combats pour arriver au vote de la loi Weil sur la possibilité d’avorter pour toutes et pour que la contraception soit remboursée par la Sécurité Sociale.
Mai 68 n’a pas créé le mouvement de libération des mœurs, il l’a accompagné.
Les féministes faisaient un travail important, les écrits de Kate Millett ou de German Greer ont fait boule de neige jusqu’au mouvement du MLF (Mouvement de Libération des Femmes) dont j’ai vu les premières manifestations à l’université de Vincennes au début des années 70.
Le mouvement hippie n’était pas politisé comme l’étaient les nombreux groupuscules qui se sont rués dans les manifestations de Mai 68 et auxquels j’avoue ne pas avoir compris grand-chose.
Je reste une hippie. Si je dois avoir une étiquette, ce serait encore celle-là. Ma protestation se fait par ma vie simple. L’exemple me semble toujours préférable aux grandes leçons de morale.
Sur le féminisme en 68
Au fil des années, la référence à Mai 68 est devenue caricaturale et réductrice.
On voudrait en faire une crise adolescente de libération sexuelle. Je n’ai trouvé aucune référence dans mes notes ou documents à ce sujet. La visite à la piscine de Nanterre du ministre François Misoffe apostrophé par Daniel Cohn-Bendit est pourtant mise en avant dans les documentaires qui sortent cinquante ans plus tard.
En relisant mes textes, je vois quelques images du machisme ordinaire qui régnait encore à la Sorbonne en mai et juin 1968 :
• Les filles font les tâches subalternes.
• Les hommes prennent la parole.
• Les filles prennent des notes, tapent à la machine.
• Je repasse la combinaison de plâtrier de mon mec avant les manifs.
La libération des mœurs était déjà avancée. Les jupes des femmes avaient raccourci depuis le début des années 60, sous l’influence de Mary Qwant à Londres en Prêt-à-porter et d’André Courrèges à Paris en Haute-Couture.
On voudrait en faire une libération des femmes. Or dans la réunion du comité d’occupation que j’ai suivie, je n’ai noté qu’une seule femme : Marie-Pierre qui s’occupe de la presse.
On savait que la crèche de la Sorbonne avait été créée par une femme, Françoise Lenoble-Pradines qui avait pu appliquer ses idées dans le ministère de Georgina Dufoy sous Mitterrand en 1981.
Mais, l’an dernier en 2017, Clémentine Autain, députée de la France Insoumise, a dû réclamer une crèche à l’Assemblée Nationale, restée dans ses ors machistes et empesés, sans grande liaison avec la réalité de la société.
Dans les documentaires sur les manifestations, que je regarde en 2018, on voit peu de militantes. Les filles sont venues plus tard, comme je l’ai fait moi-même, seulement à la fin du mois de mai. On nous demandait surtout d’être des secrétaires ou d’œuvrer pour le repos du guerrier.
Si une réunion s’est faite dans un amphi de la Sorbonne sur la condition de la femme, je n’en ai pas entendu parler alors. La sociologue Évelyne Sullerot représentait le courant officiel des recherches sur le sujet.
Il a fallu l’influence du Women’s Lib pour permettre au Mouvement de Libération des Femmes (MLF) de se révéler plus tard à partir de 1971. Si le féminisme n’était pas d’actualité dans les préoccupations des militants politiques, les femmes ont pris elles-mêmes leur destin en main grâce au mouvement de Mai 68, au point de créer d’abord un mouvement non mixte pour ne pas fausser les relations de travail, tant étaient ancrées les notions de suprématie du mâle.
Mai 68 a surtout permis une libération de la parole entre les gens et entre les classes. La grève générale a fait craquer les structures sociales et permis aux différentes classes de se côtoyer.
Je me souviens avoir rencontré en haut du boulevard Saint-Michel, juste avant la manifestation du dimanche soir 26 mai, mon ami Petrus Cournot (c’était son quartier il est vrai, il habitait de l’autre côté du Luxembourg) et ses amis les vicomtes de Ganay qui eux venaient des beaux appartements de la Place des Vosges. Ils avaient des casques de chantier et se préparaient à jouer les secouristes.
Je me souviens avoir rencontré, dans le grand amphi de la Sorbonne où la discussion était permanente, Kiki Féraud et des amis venus des beaux quartiers s’encanailler à la Sorbonne libérée.
Dehors, dedans, dans un brouhaha généreux et joyeux, tout le monde parlait, osait discuter de sujets qu’on n’aurait jamais osé évoquer auparavant.
Rien que pour ça, Mai 68, on en parle encore, cinquante ans plus tard !
Après Mai 68 les luttes
Après Mai 68, j’avais eu besoin de comprendre le nouveau monde et les nouvelles idées qui bouleversaient la société en profondeur. Inscrite d’abord en septembre 68 à la fac de Nantes en sociologie, je suis revenue à Paris quand le nouveau Centre Universitaire Expérimental s’est créé sur terrain militaire dans le bois de Vincennes. J’avais suivi les cours de Maurice Duverger à la fac de droit d’Assas, ceux de Raymond Aron à la Sorbonne, j’avais besoin de travailler sur des matériaux plus politisés.
Les cours de Théorie marxiste me plongeaient dans des ouvrages comme celui de Lénine que je viens de rouvrir : LA RÉVOLUTION PROLÉTARIENNE et le renégat Kautsky, V. I. Lénine, Éditions sociales, 2e trimestre 1953. Une citation cochée au crayon me tombe sous les yeux.
« L’impérialisme est le capitalisme arrivé à son stade de développement où s’est affirmée la domination des monopoles et du capital financier ; où l’exportation des capitaux a acquis une importance de premier plan ; où le partage du monde a commencé entre les trusts internationaux et où s’est achevé le partage de tout le territoire du monde entre les plus grands pays capitalistes. »
Lénine a fait cette analyse en 1916, il y a plus d’un siècle.
Cinquante ans après Mai 68, j’ouvre au hasard un autre livre de ma bibliothèque politique : Malaise dans la civilisation, publié à Vienne en 1929, de Sigmund Freud. Je vois cette phrase soulignée.
« Quand une communauté humaine sent s’agiter en elle une poussée de liberté, cela peut répondre à un mouvement de révolte contre une injustice patente, devenir ainsi favorable à un nouveau progrès culturel et demeurer compatible avec lui. Mais cela peut -être aussi l’effet de la persistance d’un reste de l’individualisme indompté et former alors la base de tendances hostiles à la civilisation. La poussée de liberté se dirige de ce fait contre certaines formes ou certaines exigences culturelles, ou bien même contre la civilisation. »
Il me semble que l’esprit de Mai, tel que nous le vivions alors, tel que nous l’avons vécu ensuite, participait de la première partie de la citation. Mais depuis quelques années, depuis Sarkozy et sa mise en œuvre de décomplexion des riches, nous vivons sur la forme des tendances hostiles à la civilisation.
« Un bon nombre de luttes au sein de l’humanité se livrent et se concentrent autour d’une tâche unique : trouver un équilibre approprié, donc de nature à assurer le bonheur de tous, entre ces revendications de l’individu et les exigences culturelles de la collectivité. Et c’est l’un des problèmes dont dépend le destin de l’humanité que de savoir si cet équilibre est réalisable au moyen d’une certaine forme de civilisation, ou bien si au contraire ce conflit est insoluble. »
Pourquoi autant de temps s’est-il passé depuis qu’ont été écrites ces phrases ? Pourquoi n’avons-nous pas avancé ? Perdrions-nous notre temps à discutailler de points de détail sans avancer sur l’essentiel ? Nous bornerions-nous à stigmatiser l’inutile au lieu de mettre en œuvre le vital ?
Ou est-ce qu’au final il n’est plus utile d’écrire ni de lutter ? Devons-nous imiter Nikos Poulantzas, notre professeur de Théorie marxiste de la fac de Vincennes, qui, après avoir jeté ses propres livres et documents, s’est jeté lui-même dans le vide de la Tour Montparnasse, sous les yeux de son ami de toujours Constantin Tsoukalas, autre professeur grec, qui m’avait raconté leur adolescence et leur jeunesse à Athènes, leurs vacances au Mont-Athos (in Clandestine 70, un de mes cahiers en cours de publication).
L’histoire est racontée par un assistant de nos cours, Michael Löwy. Je la lis, bouleversée, au moment de finir ce livre.
Tsoukalas, connu en dehors de la fac, avait été un autre de mes mentors. Il m’avait appris à « devenir méditerranéenne », à ne plus être la « petite Bretonne angoissée » d’alors, à être dans le Carpe Diem, pour vivre chaque moment comme si c’était le dernier.
Je ne connais plus la peur pour moi-même depuis que j’ai failli mourir plusieurs fois.
J’ai appris de ces expériences hors-norme que la vie peut être très forte, là où nous avions cru être vulnérables.
Mon naturel est confiant et optimiste.
J’ai vu la Bretagne, polluée par les marées noires de 1976 et 1999 ou abattue par l’ouragan de 1987, reprendre vie.
Et quand je vois les manifestations du printemps 2018, je reprends confiance en la santé de la France.
Il me semble que les luttes du printemps 2018 sont de nature à reciviliser la société française.
On voit des cheminot(e)s et des étudiant(e)s lutter contre des projets qui ne les concernent pas directement, mais qui auront un impact sur la vie de celles et ceux qui viendront après eux. Ce ne sont pas pour des revendications strictement individualistes qu’ils et elles se battent, malgré les forces de police disproportionnées que le régime oligarchique leur oppose, c’est pour le bien commun.
Nous sommes tous et toutes concerné(e)s par les services publics, du transport, de l’éducation, de la santé, des impôts. Nous devons les soutenir pour ne pas mourir.
L’échec de Mai 68
C’était mieux avant ?
Pas sûr.
Les auteurs des siècles précédents, et même de l’antiquité, se plaignaient déjà de la décadence, du manque d’attention, de la baisse de qualité de l’éducation.
Le genre humain n’est jamais content.
C’est sans doute ce qui lui permet de progresser.
Mais comme nous le recommandait Casamayor, il faut rester vigilant, surtout sur nos Libertés publiques. Car d’elles dépendent notre intégrité, notre sécurité et notre dignité.
Si je devais incriminer une baisse de niveau, ce serait la télévision que je mettrais en première responsable : piètre niveau culturel, perte de l’activité personnelle, baisse des échanges, matraquage de l’information en continu, passivité sur canapé.
Je me rappelle avoir participé à une kermesse de l’école primaire de ma dernière fille née en 1988. Le livret de la pièce jouée était sur Mai 68 et la suite. Les enfants avaient choisi leurs personnages dans des clichés simplistes qui m’avaient alertée, même dans un divertissement. J’avais tenté d’en discuter avec les maîtresses et d’autres parents, mais j’étais complètement décalée par rapport à l’évolution des intérêts avant le passage à l’an 2000, donc avant que l’Internet entre dans les maisons.
J’étais sur Internet depuis 1995, j’avais d’autres sources d’information que la télévision.
Où je mettais Angela Davis, activiste des droits civiques, on m’opposait Michael Jackson, chanteur populaire. Un des personnages rêvait d’être riche comme lui. Un autre rêvait d’être footballeur pour être riche aussi. Une des filles voulait être mannequin parce que ça gagnait bien. Aucun enfant n’avait choisi de métier où l’on parlait, s’exprimait, écrivait, soignait, échangeait, faisait, construisait. Tous voulaient travailler dans le loisir ou les apparences. Aucun enfant n’avait envie de faire des études pour comprendre le monde, y participer et le faire progresser pour le bien commun. J’étais atterrée.
J’ai craint que la société du spectacle dénoncée par le situationniste Guy Debord avant Mai 68 soit là, terriblement là. Une société où les journalistes devenaient des animateurs devant faire le buzz pour être reconnus du plus grand nombre, les consommateurs.
Car la télévision avait servi de nounou et de baby-sitter à ces enfants de la fin des années 80.
J’avais déjà eu conscience de cet état de fait dès 1971, quand j’ai travaillé à France-Culture dans une émission de radio culturelle où le producteur me demandait d’être aussi impertinente et même agressive que l’était Yves Mourousi à la télévision le midi. Bien sûr, je n’étais pas faite pour ce genre de choses. J’ai préféré partir à la montagne ariégeoise que de participer à une dégradation de l’intellect. Au moins, au village, j’étais avec des gens que je pouvais respecter.
Mes vieilles voisines du Bosc m’apprenaient leur culture ancestrale et je leur rends grâce tous les jours encore de m’avoir tant appris après mes années d’université. J’avais été bien accueillie, alors que je débarquais de chez Féraud et de Vincennes. Pas vraiment la formation idéale pour une vie néo-rurale. Mais on disait que j’avais été institutrice. On ignorait mes diplômes universitaires, mais cette fonction républicaine respectable m’a donné tout de suite une place légitime au village. Lors des élections de 1974 et 1981, on venait me consulter pour savoir pour qui il fallait voter. Le village avait voté en grande majorité pour René Dumont et Brice Lalonde aux premiers tours. Aux seconds tours, c’était bien sûr pour François Mitterrand, on était dans un bastion socialiste par tradition.
Nos voisins communautaires des villages au-dessus inventaient une nouvelle vie issue de l’esprit de Mai, en autogestion, testant de nouveaux modes de comportement entrés plus tard dans nos mœurs, en alimentation, pédagogie, agriculture, culture. Ils tournaient le dos à des carrières sociales où ils auraient été bien rémunérés pour vivre selon d’autres critères que les références économiques ou matérielles.
C’est ce qu’ont fait les gens sur le Larzac et les zadistes à Notre-Dame-des-Landes que les gendarmes mobiles inondent encore, à la minute où j’écris, de grenades lacrymogènes polluantes pour le sol, détruisant la flore comme la faune et intoxiquant gravement une population qui n’agressait personne, mais entretenait bénévolement les terrains de zone à aménagement différé, parfois depuis les années 60.
Ce que j’ai vu vivre en Ariège après Mai 68 est devenu la norme dans de nombreux domaines en mai 2018. Les avant-gardes ont raison avant les autres. Elles devraient être protégées au lieu d’être éradiquées. On avait dans la ZAD de Notre-Dame-des-Landes de formidables laboratoires. En les détruisant, l’État perd des années d’expérimentations, détruit des innovations précieuses dont notre monde a un besoin urgent pour survivre.
Sans parler du terrible gaspillage d’argent qui se fait là alors qu’on supprime les postes et budgets pour les écoles, les lycées, les facultés, les hôpitaux, les maisons de retraite, les gares, les lignes de transport.
Sans parler de l’utilisation d’armes de guerre, dont une grenade vient d’arracher une main à un jeune étudiant en sociologie venu étudier de nouveaux comportements pour mieux gérer la planète sans la polluer. Effrayant ! Injustifiable !
Aucun régime démocratique ne peut légitimer une telle violence contre le peuple.
La France était considérée comme la patrie des droits de l’homme, c’était un phare pour la plupart des peuples de l’humanité.
En 2018, la solidarité, qui était un devoir humain, la solidarité est devenue un délit. Je répète, la solidarité qui était un devoir est devenue un délit.
Alors oui, si effectivement on en est là en 2018, Mai 68 a été un échec. Si on veut lui faire porter tous les maux, oui c’est sûr, Mai 68 est un échec. Un terrible échec.
Je crains le pire pour les manifestants actuels en butte à des violences policières bien plus graves que celles que nous avions l’habitude de voir dans notre quartier entre la rue Visconti à Saint-Germain-des-Prés, en bas du Boul’ Mich’, et la rue du Pot de fer à Mouffetard en haut du Boul’ Mich’.
Dans un documentaire sur Mai 68, j’avais entendu le petit-fils du général De Gaulle, Yves De Gaulle, raconter des conversations qu’il avait eues avec son grand-père. Il lui aurait dit : « Je n’ai pas utilisé la force contre les généraux putschistes, je ne vais pas l’utiliser contre des jeunes de l’âge de mon petit-fils. »
Le général savait ce que force veut dire. Il incarnait celle de la France. Le Premier communiant actuel n’en a aucune idée, il doit faire la preuve de ses compétences à gouverner et il ne sait qu’envoyer ses petits soldats « Playmobil » au combat.
Un combat perdu d’avance, car, s’il semble légal, il n’est pas légitime.
Gaelle Kermen, écrit au printemps 2018
Kerantorec, le 19 janvier 2019
À suivre : En 2018 50 ans de Mai 68 à Kerantorec
Chapitres extraits du livre écrit au printemps 2018 Des pavés à la plage Mai 68 vu par une jeune fille de La Sorbonne