#écrire #manger #vivre #régime
L’écriture est un art de vivre
Qu’il faut manger pour vivre et non vivre pour manger, disait Valère à Harpagon dans L’Avare de Molière.
On ne peut pas se passer de manger. Cette nécessité revient plusieurs fois par jour, sans pouvoir éluder. Quand on est en phase d’écriture intense, de conception d’ebook ou de manuscrit, on a besoin d’avoir des solutions rapides et efficaces, pour reprendre des forces, tout en gardant sa concentration.
Pour bien vivre pendant la conception du guide Scrivener plus simple, j’ai gardé mon régime habituel, qui me permet de rester en bonne santé, indispensable pour tenir la route de l’écriture, épreuve de force autant physique qu’intellectuelle.
Depuis que je ne suis plus obligée de préparer à manger pour plusieurs personnes, j’ai une routine alimentaire simple pour ne plus me compliquer la vie. Cette routine est encore plus drastique en période de travail intellectuel intense comme l’a été la construction du guide. Elle a été productive. C’est pourquoi j’ai le plaisir de la partager avec vous, non pas en modèle, car chacun a son propre métabolisme et son propre contexte de vie, plutôt pour vous inspirer à trouver la vôtre.
Une routine alimentaire simple
Je vis à la campagne, au bord de la mer, en Bretagne sud. Mes voisins partagent avec moi leur panier AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne). Avec ma famille ou mes amis, je vais à la pêche à pied au moment des grandes marées. C’est l’occasion de faire quelques agapes et de socialiser un peu.
Je n’aime pas sortir pour aller faire des courses, aussi je ne vais faire de grosses courses que toutes les quatre ou six semaines. Ainsi je garde ma concentration pour l’essentiel, l’écriture, et quand il ne reste plus grand chose, je fais preuve d’imagination.
Je fais le maximum de choses moi-même, pain, yaourts, congélations et conserves.
Le pain, c’est la base. J’avais été impressionnée il y a très longtemps, en 1971 ou 72, par une émission de l’ORTF (Office de radiodiffusion-télévision française) sur Marguerite Yourcenar, par Mathieu Galey, à Petite Plaisance, dans l’île de Mont Desert aux États-Unis, où notre première académicienne a fini sa vie. On l’y voyait faire son pain elle-même. L’image s’est gravée en moi, avec une phrase où elle déclarait se demander avant chaque achat si vraiment elle avait besoin de ce bien de consommation. Quand je suis dans un supermarché, je me demande toujours si j’ai réellement besoin d’acheter telle ou telle chose. Souvent la réponse est non et je me concentre là aussi sur l’essentiel, la liste que j’ai fait sur Simplenote quand je manquais d’un produit indispensable. Merci à Marguerite, qui m’a appris à ne jamais consommer inutilement, car je sais bien vivre avec peu.
Après ma période de vie parisienne entre 1960 et 1975, j’ai vécu en Ariège, au Bosc, en petite montagne, il fallait faire plusieurs kilomètres pour acheter du pain, on achetait des gros pains au marché de Foix, mais s’il fallait compléter en cours de semaine, je faisais du pain. J’ai appris à faire les conserves avec les vieilles du village. Je pense souvent à elles qui m’ont appris la survie en conditions difficiles. Mes vieilles amies du Bosc et Marguerite Yourcenar ont été des guides de bonne vie, simple et saine. Gratitude !
Pour pouvoir enfin gérer mes projets d’écriture mis de côté près de cinquante ans, j’ai opté pour une vie érémitique et je sors le moins souvent possible de mon domaine. Faire mon pain tous les cinq jours permet ce choix. Un ami m’avait offert une machine à pain pour mes 60 ans, ça m’a permis de devenir autonome, de n’être pas obligée de ressortir pour le pain ! Maintenant, je préfère faire ma pâte à pain au mixer avec des crochets en queue de cochon dans un cul de poule et je la fais cuire sur une plaque réfractaire dans le four de ma cuisinière. Je fais aussi mes brioches ou mes petits gâteaux.
Je prépare aussi mes yaourts dans une yaourtière. Je fais égoutter les yaourts, le petit lait est récupéré pour les brioches ou le pain, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, selon Lavoisier.
J’ai investi dans une trancheuse. Je tranche mon pain et le congèle, je sors les tranches au fur et à mesure. J’achète le jambon sec en quart et le fromage à pâte cuite en gros morceaux, que je tranche aussi selon la finesse désirée. Solutions économiques pour des produits toujours bien présentés.

En été, je fais des confitures et des sorbets, en automne je congèle des fruits, des châtaignes. Je les consomme en hiver.
Le régime alimentaire d’écriture
Le matin, après une première séance de travail d’écriture, j’ai besoin de protéines au petit déjeuner. Je prends donc du jambon de pays, du saucisson ou du fromage, avec du café noir, un grand bol à la bretonne, du pain, de la brioche et des marmelades maison.
Le midi, ou plutôt vers treize ou quatorze heures, je me fais une salade de crudités fraichement râpées, complétée par ce que j’ai sous la main, puis du fromage avec un verre de vin.

En hiver, je fais germer des lentilles, pour avoir des vitamines fraîches tous les jours. Je les ajoute aux salades. Un œuf si j’en ressens le besoin. Des pissenlits qui poussent sur mes terrasses, de la bourrache, un peu d’oseille, des orties dès que le printemps revient.
Après les fêtes de Noël, qui ont interrompu trois jours la rédaction du Guide Scrivener, je me faisais des sandwichs à base de blanc de chapon, cuisiné à Noël avec les enfants. Un délice, économique lui aussi.
S’il fait froid, mais il n’a pas fait froid ce mois de décembre 2015, je me fais une à deux fois par semaine un bon gros plat familial. Je viens d’une famille nombreuse, j’aime les plats paysans qui tiennent au corps, pas les plats de chefs dressés à la pince à épiler, qui arrivent froids en salle, soi-disant parce que ce sont des tableaux. Les tableaux je les mets sur mes murs, pas dans l’assiette.
Je fais réchauffer ces gros plats par portion individuelle au micro-ondes, trois ou quatre jours de suite, en changeant éventuellement les garnitures, selon ce que j’ai en légumes. Je fais cuire aussi souvent des pâtes, on a besoin d’hydrates de carbone quand on est en chantier, et l’écriture est un chantier.
Le dessert est en général un fromage frais, avec un carré de chocolat, jamais deux, comme le verre de vin, un seul, pas deux. Un seul carré de chocolat quotidien me permet d’être bien, de savourer le goût, sans créer de dépendance. Un café expresso.

Au goûter, un thé anglais, avec un scone ou de la brioche maison, ou un gâteau, préparé par ma fille Ana, fine pâtissière.
Le soir, je mange toujours une soupe d’au moins cinq légumes, avec parfois des lentilles mixées, ou des pois cassés, ou de la semoule, pour un bon liant. J’ai aussi des légumes congelés, prêts à être utilisés à la machine à soupe, avec un bouillon de volaille pour assaisonner et de l’eau chauffée à la bouilloire pour aller plus vite. Les légumes sont mixés ou pas, selon les plats du moment. S’ils sont entiers, ils servent dans les salades du lendemain midi ou de garnitures pour un plat.
En dessert du soir, je mange du porridge au lait et de la compote de pommes maison.
C’est le régime d’hiver qui me permet d’être bien en période d’écriture intense, comme l’a été celle du Guide Scrivener. Pendant le chantier de bûcheronnage, qui terminera l’hiver, je ferai des plats plus conséquents comme des pâtes en sauces, du bœuf bourguignon, du pot au feu, de la choucroute, du chou farci aux châtaignes.
Les jours de fêtes, je cuisine des fruits de mer pêchés par nos soins (huîtres, coques, palourdes).

Dans l’ensemble, j’ai un régime sobre, qui me convient bien. Des amies s’inquiétaient de ce que je ne mangeais pas assez, ne comprenant pas que je ne sorte jamais de chez moi, sauf pour faire des courses toutes les trente-six du mois ou pour aller à la pêche à pied au moment des grandes marées, sept à huit fois dans l’année.
Pas de quoi s’inquiéter : mes analyses de sang sont bonnes, ainsi que me l’avait dit mon amie-médecin : Je ne sais pas quel est ton régime, mais c’est un bon bilan !
Je ne me laisse pas abattre, j’aime trop les bonnes choses. Et puis, j’ai très faim quand je sors de quatre à six heures de travail intellectuel, qui parfois me fait plus transpirer que mes séances de tronçonneuse sur les haies du domaine.
Quand je suis en plein travail, j’ai besoin d’avoir une routine simple. Pas de prise de tête pour savoir ce que je vais manger. Donc des plats préparés d’avance, en partie congelés, pour être réchauffés quand j’en ai besoin ou envie, en assiette au four micro-ondes.
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Je vous ai transmis quelques petits secrets de cuisine personnelle pour être en forme au cours d’une période de création.
Et vous, avez-vous des secrets pour bien écrire ?
Partagez-les, c’est stimulant.
Sans Marguerite Yourcenar, peut-être n’aurais-je jamais eu l’idée de faire mon pain. Maintenant, c’est un de mes facteurs d’équilibre et d’harmonie de vie.
Bon appétit à vous !
Gaelle Kermen,
Kerantorec, le 12 janvier 2016
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Mes recettes de cuisine simple et mes trucs de vie sobre feront l’objet d’autres Guides Kermen. Certains articles sont déjà disponibles sur mon blog de chantiers Kerantorec ou sur le blog de voyages.
Sur la yaourtière Figuine
Un chapon pour les fêtes
Recette du chou farci aux châtaignes
Sur Flickr quelques photos :
Pierre à pain et à pizza
Cuisine simple de pêche à pied
Marguerite Yourcenar : https://fr.wikipedia.org/wiki/Marguerite_Yourcenar
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Gaelle Kermen est l’auteur de Scrivener plus simple, le guide francophone pour Mac, publié par ACD Carpe Diem, 2016.
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