Fac de Vincennes-juillet-1969

mardi 1 juillet

nuit je me couche enfin après avoir rédigé un grand baratin sur les coopératives agricoles
passé une belle journée de soleil à vincennes où je n’ai d’ailleurs à peu près pas travaillé
mais j’ai vu des gens
je leur ai parlé
ça m’a permis de penser à oublier donald qui ne sait pas ce qu’il perd en me négligeant

j’ai rencontré un type d’archi qui s’occupe de la commission crèche de censier et aimerait que je m’intègre à leur groupe de recherches sur la création de mobilier pour enfants
dans ce groupe il y a aussi celui que j’aime bien d’archi et d’urba
mon beau barbu
il s’appelle michel
et m’attire follement


mercredi 2 juillet

vincennes étouffant
j’y vais pour faire mon exposé sur le front populaire et la paysannerie

lorsque nous redescendons de la salle de socio la fac a été transformée en camp retranché en zone d’autodéfense
ça a une certaine gueule d’ailleurs ces tables dressées à intervalles réguliers sur les passerelles qui relient les bâtiments
avec un casque accroché au pied supérieur droit
avec un couvercle de poubelle en bouclier entre chaque table
avec les lance-pierres et les tas de galets
et au milieu éclatant de rouge le drapeau de la gauche prolétarienne
mais je fous le camp


jeudi 3 juillet

j’ai promis à martine de faire avec elle un topo sur les g a e c
je suis donc obligée d’aller à vincennes
en fait nous parlons d’autres choses
elle a énormément de problèmes et elle les aime
je rédigerai le topo toute seule en définitive

ce soir je prends le train pour quimperlé
départ bretagne
dix heures
beaucoup de monde
chaleur
je suis obligée de prendre un supplément première classe
je suis très fatiguée
et me repose mal


vendredi 4 juillet

à six heures du matin dans le café en face de la gare de quimperlé je me remets au travail
moëlan le matin
kerfany au soleil
mes yeux s’enfoncent de fatigue
je nage dans l’eau verte et fraîche

mariage de soisick et filou chapelle du pouldu
elle tellement jolie dans la robe de shantung blanc que j’ai conçue pour elle
tellement heureuse et rayonnante
sa chère maman m’embrasse
petite chapelle sur la prairie non loin de la mer
simplicité de la cérémonie
grande beauté
beaucoup de monde
on me félicite pour la robe

ma fatigue m’envahit

en écoutant les souvenirs de la sorbonne évoqués par madame vogt femme du proviseur du lycée saint-louis j’ai l’impression d’être un an en arrière avec cette fatigue qui m’assomme


samedi 5 juillet

le chemin vers la mer
tout a été joli dans ce mariage
tout sauf moi
qui ai fini par pleurer comme une source
pleurer de lassitude
de dégoût de moi-même
incapable de garder ou d’aimer quelqu’un plus d’un mois
j’ai honte de moi

mais madame po m’a réservé une chambre dans la maison entre les pins au-dessus de beg-porz
j’ai tellement rêvé ça
per-jakez
la rivière

soisick m’a dit
tu prends le chemin qui descend vers la mer

mais je ne suis chez moi nulle part
je travaille

plage
per-jakez
nous n’aurons jamais rien à nous dire
je ne saurai jamais ce qu’il pensait


dimanche 6 juillet

la pluie est venue
large pénétrante envahissante
j’ai froid
ce pays n’est plus pour moi
j’ai hâte de rentrer à paris
de retrouver l’appartement blanc
sa douce chaleur
mes habitudes et mon travail
écrire

je m’ennuie parmi mes amis d’enfance
ils ont un rythme de vie que je n’accepte plus
trop lent pour moi
tout leur temps est passé à le perdre à le laisser couler
je ne sais pas faire ça

je rentre à paris avec le frère et la sœur aînés de filou
pluie et vent
c’est même une tempête


lundi 7 juillet

je dors
j’étais tellement fatiguée
en fin d’après-midi je me mets à taper mon rapport
mon cousin simon vient dîner avec nous
il part demain au québec

j’ai soudain envie de voyager moi aussi
d’aller étudier ailleurs
voir ce qui se passe sous d’autres latitudes


mardi 8 juillet

fin du rapport sur les g a e c
je suis assez contente
bientôt je serai très informée des problèmes agricoles
je pourrai faire des articles plus personnels
peut-être élaborer des solutions
penser autre chose
voir sous un autre angle
mais avant je dois beaucoup travailler

donald entendra parler de moi
mais peut-être n’avions-nous rien d’autre à faire ensemble


mercredi 9 juillet

j’ai remis à duroux directement mon topo sur les g a e c
il a paru intéressé de voir que je ne m’étais pas contentée de lire des bouquins mais que j’étais allée sur le terrain
il compte sur ma participation l’année prochaine dans un groupe de recherche sur l’agriculture
j’apparais de plus en plus comme la spécialiste des questions agricoles à vincennes
ça ne me déplaît pas
c’est original
ça va me faire treize unités de valeur
j’en ai fait gagner deux à martine en apposant son nom au mien à la fin du rapport
je suis trop bonne
mais j’en ai rien à foutre


jeudi 10 juillet

je dors
je dors

je vais enfin toucher mon salaire de monitorat

pas énorme mais c’est déjà ça
volupté de pouvoir enfin m’offrir la révolution rurale en france de gordon wright
il parle de bernard lambert
alors
lambert

volupté de manger une glace au wimpy de la rue soufflot
de choisir mozart pour anne
et dylan pour moi

à la f n a c fédération nationale d’achats avec le cher emmanuel du c r a c souvenir d’il y a un an à la sorbonne

dylan et ses arrachements de cœur et d’harmonica
et pour finir
le film easy rider
très marcusien


vendredi 11 juillet

zut de nouveau j’ai envie d’être amoureuse
à croire que dès que je ne travaille plus je me sensibilise
mais j’en ai marre de mon corps que j’entretiens qui s’arrondit qui embellit et qui sert à rien ni à personne

j’aurais aimé être comme jolie soisick toute douce d’amour et d’attente éblouie

malheureusement je suis obligée de constater que je suis de celles qui luttent qui n’attendent pas qui travaillent qui aiment sportivement
tout ça pour ne pas souffrir

mais donald
tiens pourquoi je repense à lui
est aussi comme ça
non c’est faux
il souffre mais pas pour moi

donald pourquoi je t’ai rencontré
qu’est-ce que tu peux faire sur ma route
toi qui m’exaspères parfois au point que je voudrais ne jamais t’avoir connu
toi qui me fais hurler mais à l’intérieur seulement
parce que je suis encore trop lâche
ou que ta voix
ta voix que je voudrais détester
ta voix censée qui posément donne son avis sur tout
ta voix grave
ta voix belle
est malgré tout convaincante
toi que je voudrais rassurant
toi qui pourrais l’être
toi qui pourrais me protéger me sauver de tout
toi qui saurais si bien
si tu voulais
si tu osais
simplement
ne pas passer à côté de ma vie
toi dont je me dis parfois que nous n’avons rien en commun
pour ne pas penser en vain à toi
toi qui je m’efforce de le penser ne m’aime pas
toi que je m’efforce de le croire je n’aime pas
mais il y a l’envie de ton corps sur le mien
ton corps dont j’apprends les contours
ton corps que je reçois avec soif
et qui m’alanguit

c’est fous
comme je le désire
comme je l’attends
comme je t’attends
l’envie de faire un enfant
comme si on avait jamais le droit de faire un enfant
mon frère philibert avec le désespoir légitime de ses quinze ans l’avait si bien exprimé
on n’a pas le droit de mettre des enfants au monde dans un monde comme le nôtre
dans sa naïveté exigeante et acerbe il avait peut-être raison philibert


samedi 12 juillet

voilà j’ai trouvé mon exutoire
je vais en le recherchant aimer brendan
brendan qui fut
mon plus bel amour
le seul vrai

et regardant les autres en transparence
il ne les jugeait pas
il les aimait

j’ai écrit ça dans un devoir pour casamayor


lundi 21 juillet

en rentrant de la piscine en fin d’après-midi nous avons traversé l’île saint-louis
je tremblais un peu quand même en approchant de sa rue
en tournant la tête rapidement j’ai aperçu sa triumph blanche
j’ai senti mon propre corps mince élastique étiré dans sa peau lisse

je vais revoir marc
demain ou après
je lui avais déjà trouvé quelque charme
l’an dernier


mardi 22 juillet

soirée passée avec jean qui me fait faire ses doubles-rideaux

jean réapparaît comme s’il savait que hélène est seule
il a gardé les panneaux de toile de jute de la rue maître albert
décorés par isaac
il n’a rien oublié lui non plus

j’ai senti de nouveau
impérativement cette fois
que je devais partir à la recherche de brendan
de tout ce qui fut nous
de cet amour que nous avions en trop
à l’époque du pot de fer

mozart haute fidélité
après buster keaton dans un paris chaud et un quartier latin qui ne me reconnaît plus


mercredi 23 juillet

jour chaud encore
je traîne parmi les bouquins sur l’agriculture

ça y est j’ai commencé mon bouquin
toutes ces coïncidences
en hyperfréquences
je dois maintenant accoucher de brendan
il y a trop longtemps que je le porte en moi

soir hélène appelle
on va chez elle à pied
en passant devant le buci je pense que c’est un jour rêvé pour rencontrer nigel
mais c’est évidemment improbable

eh bien si
à l’angle buci seine
il est assis
à la terrasse du café conti
tout est possible
tout est permis


jeudi 24 juillet

c’est incroyable
mais vrai
je suis toujours amoureuse de nigel
c’est confortable cet amour qui revient chaque fois que je le revois
il passe
je le sais
tout est bien


samedi 26 juillet

journée bizarre
énervement du réveil
lassitude et mauvaise humeur
en allant déjeuner chez yvon petit de voize mon merveilleux frère-ami compositeur d’enfance
qui en dessert nous offre un concerto de piano de sa composition

et puis le soleil hélène et élise

je rentre pour me préparer à sortir
paradoxe
je dois rejoindre kiki à la boutique féraud
je pense soudain à donald que j’aurais pu inviter

le téléphone sonne
c’est donald qui m’appelle et m’invite
à une soirée piscine dans la vallée de chevreuse
j’accepte
après tout qu’est-ce que je risque
souffrir un peu après si de nouveau il me perd


dimanche 27 juillet

la maison faisait penser à celle du défilé de mode dans le film de william klein qui êtes-vous polly maggoo elle sert d’ailleurs de décor de cinéma
elle est intégrée dans la nature mais très moderne à l’intérieur
belle nuit dans cette piscine qui fait partie de la maison
j’ai un corps fait pour l’eau et pour l’amour
tous ces mecs je pourrais les faire valser
comme je le voudrais
mais ça ne m’intéresse pas

qui m’intéresse
donald
je ne sais même pas

brendan m’obsède
comme si j’attendais qu’il parle
qu’il me parle
qu’il dise ce qu’il est à faire
je l’écouterais


mercredi 30 juillet

toute la journée j’ai pensé à donald
à son petit camarade camille
à jean-pierre un des types qui étaient là l’autre soir devant cette piscine de rêve hollywoodien
je suis toujours partagée entre mes désirs et mes réalités
je ne me sens pas tellement efficace en ce moment
de quoi ai-je besoin

soir chez hélène

anne a rencontré emmanuel qui a rencontré pierre qui lui a annoncé son prochain mariage avec une jolie blonde qui n’a rien dans la cervelle
ben c’est ce qu’il avait de mieux à faire
mais elle je la plains


jeudi 31 juillet

per-jakez en rêve d’eau
ineffable intangible et intact

yannis est revenu
il revient à hélène comme l’enfant à sa mère
il revient se faire plaindre soigner et laver son linge
ils sont tous pareils
pas un pour racheter l’autre

j’ai ce mois-ci commencé quelque chose d’essentiel
mon livre sur brendan
je dois le finir pour tordre le coup définitivement à mes fantasmes
quand j’aurai retrouvé brendan
je serai femme
réalisée
en équilibre

ça va être dur je le comprends chaque jour
et ce n’est pas la feuille blanche qui est à craindre
ce sont les autres
quand j’aurai compris que je les aime je serai sauvée


Écrit en juillet 1969, publié in Maquisards du Bois de Vincennes, Gaelle Kermen, 2011 books2read.com/u/brG76M

Gaelle Kermen
Kerantorec, le 2 juillet 2019


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Alloe-allez-on-ecrit : un roman collaboratif en 42 heures #1

Il y a un an, à quelques jours près, j’ai rencontré Mathieu Nicolas, le créateur du groupe ScrivenerFR. Nous nous connaissions depuis la fin du mois d’août 2017, mon mail lui avait été confié par quelqu’un de l’équipe Literature & Latte avant la formation du groupe. J’avais décliné l’invitation à être admin, ne voulant pas m’engager sur plus de choses que je ne pourrais en tenir, mais en fait je m’implique bien dans ce groupe d’entraide à l’utilisation de Scrivener pour les francophones.

Mathieu Nicolas, l’admin du groupe Scrivener FR, avait demandé à me rencontrer pour boire un café, quand il passerait une semaine en Bretagne à Brandivy pour une retraite d’écriture aux vacances de la Toussaint. Nous avions convenu de nous voir le dimanche 1er novembre pour discuter du lancement du NaNoWriMo. Il repartirait en Morbihan après notre rencontre.

Je vis en louve solitaire, mais quand on doit faire près de 200 kilomètres dans la journée pour me rencontrer, je ne me contente pas d’offrir un café ou un thé à mes visiteurs. J’ai donc invité Mathieu à déjeuner avec moi le dimanche midi. Vu son jeune âge, j’avais fait un solide risotto aux légumes. À 28 ans, on a besoin de se sustenter. Mathieu est arrivé à Kerantorec et c’était comme si on s’était toujours connu. Cet état de grâce arrive parfois. Il est vrai que par Internet, par le groupe ScrivenerFR, nous avions déjà échangé et commencions à nous connaître.

Si j’insiste sur ce moment, c’est parce que Mathieu avait vécu la veille un événement peu courant, une performance littéraire en anglais, A Novel in a Day, NiaD. Et il en était tout rayonnant, comme transformé.

Il avait écrit deux ou trois billets sur Facebook pour transmettre son émerveillement de pouvoir écrire sur son iPad installé à la terrasse d’un café d’un port du Golfe du Morbihan. Je comprenais son excitation, je la vivais depuis que j’avais acquis un iPad mini 4 avec Scrivener for iOS pour pouvoir écrire dehors dans mon jardin ou sur les chemins.

Mais il y avait plus que l’utilisation d’un matériel informatique, aussi performant fût-il. Mathieu venait de vivre une expérience particulière.

Nous étions au coin de la cheminée du salon-bibliothèque. Le feu brûlait joyeusement dans le poêle. Je l’écoutais me raconter son expérience, là où j’avais reçu des gens comme les Badinter, les Groult-Guimard, Pierre Richard, Jean Carmet, Yves Robert et tant d’autres. Surtout je revoyais, assis à sa place, Gwench’lan le Scoezec, médecin-sophrologue et Grand-druide de Bretagne, m’expliquer tant de choses sur la subtilité des énergies captées entre les deux mondes, celui des vivants et celui des morts, que nous allions fêter le lendemain.

Mathieu avait senti que « quelque chose » s’était passé. Il avait éprouvé le besoin d’en faire un article tout de suite sur son blog. Mais certaines expériences intérieures ne se traduisent pas, elles se vivent, Gwench’lan aussi me l’avait appris.

https://mathieunicolas.net/2017/10/22/novel-in-a-day/
https://mathieunicolas.net/2017/10/28/novel-in-a-day-mission-accomplie/


Cet octobre 2018, Mathieu a décidé d’adapter l’expérience anglaise en français et a lancé l’idée sur le groupe ScrivenerFR pour trouver le nom. C’est Alloé qui l’a emporté : « Allez, on écrit ! »

Le titre m’a tout de suite donné envie d’y participer. J’aime particulièrement cette stimulation que nous vivons au moment des NaNoWriMo, quand je sens l’égrégore de l’écriture rayonner autour de la planète.

Mais je pensais qu’un roman ne me concernait pas. Je suis une diariste, je sais écrire des chroniques, des essais, des articles, des fiches et guides pratiques, mais je ne suis pas romancière. Je l’avais décidé très jeune après avoir passé beaucoup de temps à écrire Aquamarine de 1969 à 1973, pendant mes études à la fac de Vincennes-Paris 8, qui va fêter son cinquantenaire en janvier prochain.

Je trouvais que les gens qui écrivent leur journal sont moins bons quand ils romancent leurs histoires. C’était le cas pour Anaïs Nin et pour Benoîte Groult, que j’avais eue comme cliente à la Crêperie à la ferme de Kerantorec, crêperie artistique, musicale et littéraire tenue de 1976 à 1986.

J’avais renoncé à la forme romanesque et j’avais décidé que je n’étais pas douée pour l’imagination et que je ne saurais jamais m’impliquer dans un projet collaboratif en écrivant un chapitre imaginé selon quelques directives et consignes de personnages, lieux, intrigues.

Par certains proches, j’avais été traitée de « rêveuse » qui devait « redescendre sur terre » et j’avais sans doute eu à cœur de montrer que je n’étais pas l’irréaliste qu’on croyait en réalisant des ouvrages en maçonnerie, menuiserie, terrassement, bûcheronnage ou tous Travaux d’Hercule révélant mes talents bien concrets et pragmatiques.

J’ai d’abord négligé l’invitation de Mathieu sur le groupe alloe.fr qui lançait une première session francophone d’un roman en 42 heures les 20 et 21 octobre 2018.

Puis il a lancé un chapitre-test. On pouvait donc essayer sans risque de se mettre en situation et de voir si on pouvait s’impliquer dans un projet commun. J’ai donc fait le chapitre-test.


Le samedi

Au réveil, j’ai ouvert les fichiers envoyés la veille au soir par Mathieu pour m’entraîner à écrire un chapitre en un week-end.

Résumé

En Hiver. L’après-midi touche à sa fin.
Erwin est sur une route de terre battue qui traverse une forêt dense et a priori hostile, surtout en hiver. La route est également peu sûre car elle est largement empruntée pour se rendre à la ville, et les voyageurs sont souvent la cible de personnes mal intentionnées.
Il cherche activement un endroit où établir son campement pour la nuit. Il a froid, il est trempé, et le temps presse.
Il doit rejoindre son maître, Shaya, le lendemain matin. Elle l’attend dans une auberge de Sidhr, une petite ville qui se situe à moins de quatre heures de marche.

Fin du chapitre : Erwin trouve la mort à côté de son feu de camp.

Version : document réalisé le 04/10/18.

J’étais un peu confuse en lisant le résumé avec un vieux doute sur mes capacités à imaginer quelque chose. Je m’étais interdit le roman pour me cantonner aux chroniques d’un journal tenu au long cours, où je savais écrire sur tous les sujets en restant toujours dans la réalité.

Erwin

État Civil : Erwin est un homme d’une vingtaine d’années.
Description Physique : Grand, allure dégingandée. Cheveux blonds et suffisamment longs pour lui tomber régulièrement devant les yeux. Il a le teint pâle et ses grands yeux lui donnent parfois un regard un peu naïf.
Famille/Passif : Inconnu.
Caractère, Points Forts/Faibles : Il est très heureux et s’estime chanceux d’avoir été accepté par Shaya, son maître. Il la respecte énormément. Elle lui enseigne une technique de méditation, le keito, qui permet de percevoir les êtres vivants aux alentours et d’avoir avec eux des échanges primaires (images, sensations…).  Il est cependant un peu perdu et éprouve quelques difficultés avec les exercices qu’elle lui impose.

Version : document réalisé le 04/10/18.

Pourtant, dès la lecture des consignes, les idées ont commencé à arriver, je visualisais le personnage (je le voyais un peu comme Mathieu), j’essayais d’apprécier le stade où il en était sur son parcours et je devais imaginer sa fin, une fin triste, on le retrouvait mort près de son feu de camp le lendemain.

Cette idée de la mort du personnage me perturbait au fil de la journée. Je ne voulais pas de cadavre dans mon texte, je déteste de plus en plus ces livres qui nous présentent la vie comme un danger permanent alors que ce n’est pas le monde dans lequel je vis. Il fallait trouver autre chose.

Des images se formaient et je voyais déjà la conclusion d’une vie après la vie, comme je l’ai déjà expérimentée aussi.

J’avais déjà envie de reporter mes idées sur une carte mentale. C’était plutôt bon signe. Je faisais les prises de notes sur SimpleMind et prévoyais d’écrire le chapitre sur Scrivener dans mon Journal comme je le fais pour des articles de blogs ou des parties de livres en cours.

Image1mindmapAlloe
Première carte mentaleSimple Mind faite sur iPad 2017

Je ne me sentais pas efficace le samedi pour écrire. Il me fallait faire comme les chattes, dormir, me reposer, rêver. J’ai fait une première carte mentale sur l’iPad prêté par mon ami Bruno pour m’apercevoir que je ne pouvais pas la partager, l’application n’étant pas enregistrée sur son compte iCloud. J’ai exporté la copie écran sur mon iPad mini pour la recopier sur ma version payée.

Image2mindmap Alloe
Deuxième carte mentale plus étoffée, faite sur Simplemind sur iPad mini 4
IMG_texteScrivener
Report du texte de la carte mentale dans une page de l’application Scrivener for iOS comme première trame du chapitre

Je pensais toujours au sujet du chapitre en me disant que ce n’était pas mon truc ce genre d’exercice de style. Pourtant, je continuais à avoir des idées, des visions, et des phrases et des paragraphes dansaient dans ma tête.

J’ai décidé de laisser passer la nuit. Si l’inspiration venait le dimanche matin, j’écrirais. Si ça m’ennuyait d’écrire, je laisserais tomber et aviserais Mathieu que je ne participerais pas à la performance littéraire.


Le dimanche

Avant de me concentrer sur ma page Scrivener de l’iPad, j’avais fait quelques recherches rapides sur la barbacane du château de Foix et sur le Col des Marrous, qui s’imposaient dans mes visions.

En fait toutes ces images sont dans ma tête, il suffit de les évoquer pour m’y retrouver à distance, même après des décennies. Mais l’écriture m’a fait voyager plusieurs jours dans ces contrées ariégeoises par la grâce du personnage, du décor et du thème proposés par Mathieu. Force et magie de l’écriture en voyage astral au-dessus des montagnes.

vue-en-plan-du-chateau-de-foix02

Le col des Marrous (09000 LE BOSC) est un lieu de randonnées pédestres et cyclistes. Le Tour de France y passe parfois, pour mon grand régal.

L’inspiration était venue, qui m’a menée là où j’avais eu quelques visions, dans la forêt primaire dont j’ai eu quelques aperçus cet été au cours de mes randonnées côtières à vélo, mais aussi de la barbacane de Foix jusqu’au Col des Marrous où j’ai vécu dans les années 73-83.

J’avais continué à prendre des notes sur Scrivener pour la trame. Soudain la conclusion s’était imposée au cours de la rédaction alors que j’ignorais au départ de quoi serait fait le chemin parcouru par Erwin.

L’initiation (titre devenu La dernière étape)

Personnages : Erwin le disciple, Shaya le maitre keito

Fin du chapitre : Erwin est trouvé mort près de son feu de camp
Recherches des assistants de Shaia
Battue dans les bois de feuillus

Lieux : Un feu de camp pour la nuit. Erwin seul.
Une route peu sûre. Le col des marrous (des voleurs).
Une auberge : Vallée de Massat. Shaya et ses assistants

La fin : Expérience de Mort Approchée. Au-delà des apparences. Présence intérieure.

Temps :
Jour : Erwin sur la route. Shaya à l’auberge
Soir/Nuit : Feu de camp près d’un oratoire en contrebas de la route

Initiation: Questionnement sur son discipulat. Interrogations. Méditation devant l’immensité du ciel. Demande d’un signe.

Chute d’une météorite : Shaya est réveillée dans la nuit

Matin : Shaya attend Erwin. Recherches au devant vers le col des Marrous

Un cratère s’est creusé devant l’oratoire.
Il ne reste plus d’Erwin que des poussières d’étoile.
On y vient depuis en pèlerinage pour trouver l’illumination, le questionnement sur son destin, on y cherche la fusion cosmique avec le grand Tout. On dit même que la terre magnétisée y est guérisseuse.

Franchement, je ne me croyais pas capable d’imaginer ce genre de fable, mais c’est venu d’un seul jet.

J’avais eu des visions la nuit précédente avant de m’endormir ; le matin au réveil, elles étaient encore là, plus précises. Un seul remède pour me vider la tête : les écrire. Plus de 2000 mots en deux heures. Un bon rendement : à 11:35, j’avais fini l’histoire. J’avais mis deux heures à la rédiger. Il fallait relire l’ensemble un peu plus tard, le passer à l’Antidote et l’envoyer à Mathieu.

En fin de journée, j’envoyais le fichier du chapitre à Mathieu. À l’heure dite à quelques minutes près. J’aurais dû revoir tout de suite ma copie parce qu’en fin d’après-midi j’ai toujours un gros coup de barre. Je le saurai pour la vraie performance d’un Roman collaboratif en 42 heures. Alloé !


La veille de alloe 2018

Cette performance m’a transformée comme celle de l’an dernier semblait avoir transformé Mathieu quand il est arrivé chez moi tout auréolé de lumière. Je suis myope, depuis ma petite enfance j’ai pris l’habitude de voir les gens en intensité de lumière. Je peux dire que Mathieu rayonnait. Je ne sais pas s’il a été conscient de sa transformation, je veux le croire, parce qu’il a publié Les contes de la nuit des marmites cette année et réalisé de belles choses.

Moi aussi, je suis désormais transformée par cette expérience intérieure. J’envisage de romancer certaines parties sensibles de mon Journal que je ne peux publier in extenso. Je peux raconter des histoires sans être trop littérale, mais plus littéraire. Et ça fait toute la différence du monde !

Ce week-end-là, je lisais La trilogie marseillaise de Jean-Claude Izzo et je comprenais que la forme du roman permettait aussi de transmettre des idées, philosophiques, sociologiques, politiques, économiques, écologiques. Jusque-là, je ne l’avais pas cru possible pour mes écrits.


Week-end du 20-21 octobre 2017

Je m’étais donc limitée moi-même. Les barrières sont toujours dans nos têtes.

Ne vous limitez jamais. Jetez-vous à l’eau, nagez, écrivez ! L’adrénaline est aussi forte en performance littéraire qu’elle peut l’être en art ou en sport.

Rendez-vous dans la nuit du 20 au 21 octobre, copies à rendre le dimanche 22 avant 18 heures à mathieu@alloe.fr.

Et un peu plus tard pour voir le résultat final de nos contributions.

Gaelle Kermen,
Kerantorec, le 20 octobre 2018

PS pour le texte écrit pendant ce chapitre-test, il est possible que Mathieu publie un bonus où il figurera. A plus tard donc !

Et d’ici là, écrivez, participez !


groupe ScrivenerFR
Literature & Latte (Scrivener)
A Novel in a Day, NiaD (idée de Pigfender)
blog de Mathieu Nicolas
https://mathieunicolas.net/2017/10/22/novel-in-a-day/
https://mathieunicolas.net/2017/10/28/novel-in-a-day-mission-accomplie/
allez on écrit ! alloe.fr
http://alloe.fr/participer-2018
http://alloe.fr/chapitre-test



portraitGaelleKermenparAnaLDS
Gaelle Kermen est l’auteur des guides pratiques Scrivener plus simple, le guide francophone pour Mac, Windows, iOS et Scrivener 3, publiés sur toutes les plateformes numériques.

Diariste, elle publie les cahiers tenus depuis son arrivée à Paris, en septembre 1960. Publications 2018 : Journal 60 et Des Pavés à la plage Mai 68 vu par une jeune fille de la Sorbonne.

Vaguemestre depuis 1997, blogueuse des années 2000, elle publie plusieurs blogs sur ses sujets de prédilection, l’écriture sur gaellekermen.net, les chantiers d’autoconstruction sur kerantorec.net, les archives d’un demi-siècle sur aquamarine67.net et les voyages ici ou ailleurs sur hentadou.wordpress.com.

l’AmazonKindle3 est tres solide, la preuve j’ai marche dessus

L’AmazonKindle3 est très solide, la preuve : j’ai marché dessus et il s’est juste déclipsé légèrement.

De Amazon Kindle 3

Hier soir j’ai cru avoir cassé le Kindle en marchant dessus dans le noir. J’ai entendu un crac fort inquiétant et j’ai cru l’avoir brisé en morceaux. A tâtons je l’ai ramassé, j’ai allumé mais rien ne s’éclairait, il était en position de veille mais comme il n’est pas retroéclairé, je ne pouvais rien voir. J’ai tout essayé et tout marchait bien. Ouf, j’ai eu chaud. En fait, les coins côté stéréo s’étaient un peu ouverts et j’ai pu les remettre, c’est un simple clipsage.

Ce matin j’ai tout vérifié, tout marche. Je peux donc affirmer que ce Kindle est solide, car, si je ne suis pas un vrai poids lourd avec 52 kilos, mon pas n’était pas spécialement léger quand j’ai mis le pied dessus et que j’ai entendu le crac inquiétant…

J’ai donc repris ma lecture après m’être recouchée, rassurée.

J’eusse été vraiment peinée de l’avoir abîmé si vite, moi qui aime tant garder mes outils longtemps. Bien sûr l’investissement n’en était pas très élevé, 156 euros ce n’est pas une grosse somme. Mais il y a déjà bien plus plus moi que le seul investissement matériel. Il y a surtout le bonheur de lire tout simplement avec aisance, facilité, concentration. Comme je ne le ressentais plus depuis un certain temps.

© gaelle kermen 2010